TRIBUNE — par une auditrice qualité qui n’a pas sa langue dans sa poche
La lecture du dernier Plan interministériel d’amélioration de la qualité de la formation professionnelle et de lutte contre la fraude m’a laissée partagée entre un soupir de soulagement… et une montée d’adrénaline. Enfin, les choses bougent ! Enfin, l’État prend à bras-le-corps ce que nous, acteurs du terrain, pointons depuis des années : trop de dérives, trop d’opacité, trop de failles dans notre système de régulation. Mais aussi (et c’est essentiel à mes yeux) trop peu de reconnaissance pour celles et ceux qui travaillent bien.
Je le dis haut et fort : ce plan est une opportunité pour rebâtir une crédibilité collective autour de la formation professionnelle. Et pour celles et ceux qui pensent encore pouvoir contourner les règles ou bricoler du qualitatif à la petite semaine, j’ai une bonne nouvelle : le temps de l’impunité est fini.
Un rappel utile : Qualiopi n’est pas une "démarche administrative"
Depuis sa création, la certification Qualiopi est trop souvent réduite à une formalité administrative. Un tampon à obtenir pour accéder aux financements publics. Un prérequis « parce qu’on n’a pas le choix ». Erreur monumentale ! Qualiopi, c’est un outil stratégique. Une colonne vertébrale. Un miroir dans lequel tout organisme de formation devrait oser se regarder.
Mais reconnaissons-le : trop d’organismes se sont fait accompagner par des cabinets qui vendent du “copier-coller”, trop d’audits ont été réalisés sans respect des règles qui s’imposent, trop de certificateurs ont fermé les yeux par manque de consignes claires. Résultat : un niveau d’exigence hétérogène et une perte de sens de l’outil.
Ce qui change avec le plan 2025 : une révolution salutaire
Le texte publié en juillet 2025 est sans ambiguïté. L’objectif est clair : rehausser le niveau de qualité structurel de l’offre de formation.
Voici les évolutions que je salue (et que j’attendais depuis longtemps) :
✅ 1. Extension du périmètre de Qualiopi
Les organismes qui délivrent des formations certifiantes (RNCP/RS), même sans fonds publics, devront désormais être certifiés Qualiopi. Enfin ! Cela met fin à une hypocrisie : jusqu’ici, on pouvait vendre une certification d’État sans aucun gage qualité, simplement parce qu’on ne demandait pas de subvention.
✅ 2. Contrôles systématisés en présentiel
Fini les audits par écran interposé. La présence obligatoire du dirigeant lors de l’audit est une excellente chose : un organisme, ce n’est pas un tableur, c’est une vision, une organisation, une culture. Et tout cela commence au sommet.
✅ 3. Certification obligatoire des auditeurs
Autre point crucial : les auditeurs eux-mêmes devront suivre une formation certifiante inscrite au Répertoire Spécifique. Cela va contribuer à homogénéiser les pratiques et à professionnaliser davantage nos métiers.
✅ 4. France Compétences comme vigie des certificateurs
On confie à France Compétences un rôle de coordination des pratiques des certificateurs Qualiopi. Cela va permettre, espérons-le, d’en finir avec les dissonances entre certificateurs, qui ont parfois semé la confusion dans le secteur.
Le ton est donné : tolérance zéro
Le mot est lâché. Et pour une fois, ce n’est pas une posture politique mais un engagement réglementaire : suspension de la déclaration d’activité en cas de fraude avérée ou même suspectée, sanctions renforcées, coordination des contrôles entre services de l’État, financeurs et certificateurs.
Autrement dit : les acteurs vertueux seront enfin distingués des autres.
Un monde meilleur (pour la formation) est possible
En tant qu’auditrice qualité, j’ai vu de tout. Des OF de garage gérés comme des usines à cash, mais aussi des équipes formidables, investies, alignées avec leur mission d’intérêt général. Ce plan, c’est pour eux, pour nous. Il faut redonner du sens au métier de formateur, au rôle de l’organisme, à la responsabilité vis-à-vis des apprenants.
Et aux dirigeants d’OF qui se demandent encore si Qualiopi « vaut le coup » ou si « c’est pas un peu trop lourd à mettre en place », je dis : vous n’avez encore rien vu. Car l’enjeu n’est plus de survivre. L’enjeu est de perdurer dans un écosystème qui se réorganise. De se faire respecter. De prouver que l’on forme vraiment, pas que l’on vend des heures de PowerPoint.
En conclusion
Ce plan marque un tournant. Il impose aux acteurs de la formation de sortir de l’ambiguïté : soit on est dedans, et on joue le jeu avec exigence, soit on est à côté et on devra bientôt rendre des comptes.
Et moi, je vous le dis avec toute la passion que j’ai pour ce métier : c’est une excellente nouvelle.
À celles et ceux qui croient à la qualité comme levier d’émancipation, d’efficacité économique, de transformation des parcours, je tends la main.
Aux autres… je tends le référentiel. 📚😉
Et vous, vous êtes prêts pour le nouveau monde de la formation professionnelle ?
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