Pendant plusieurs années, le CPF (Compte Personnel de Formation) a été vu comme une formidable opportunité pour les organismes de formation. Une source de financement massive, accessible à tout actif, qui permettait aux formateurs et formatrices indépendants de développer une offre rentable, tout en répondant à une vraie demande.
Mais en 2025, le paysage a radicalement changé. Règles plus strictes, exigences renforcées, procédures complexes : accéder au CPF n’est plus une formalité. Pour beaucoup de porteurs de projets, c’est même devenu une galère administrative qui finit par décourager les plus motivés.
Alors, est-ce encore possible d’accéder au CPF quand on est indépendant ou une petite structure ? Oui, mais à une condition : adopter une approche rigoureuse, structurée, et suivre un parcours précis, sans faux pas.
Dans cette enquête, on décrypte les étapes incontournables, on analyse ce qui bloque dans la pratique, et on explique pourquoi, en 2025, seuls les organismes les mieux préparés parviennent à franchir toutes les barrières.
Accéder au CPF : un parcours balisé en apparence… mais verrouillé en pratique
Sur le papier, accéder au CPF semble relativement simple. Le site du ministère évoque quelques conditions : être organisme de formation, être certifié Qualiopi, proposer une formation éligible. En réalité, le chemin est bien plus étroit qu’il n’y paraît, et semé d’embûches. Pour y parvenir, il faut franchir quatre étapes successives, sans lesquelles aucun accès à la plateforme EDOF ne sera possible.
Étape | Description |
---|---|
1. Obtenir un NDA | Déclarer son activité de formation auprès de la DREETS après avoir réalisé une première prestation avec un client. Dossier complet exigé (programme, convention, facture, documents légaux...). |
2. Obtenir la certification Qualiopi | Passer un audit qualité avec un certificateur accrédité. Nécessite une préparation rigoureuse (processus, indicateurs, documents, etc.). |
3. Proposer une formation certifiante | Soit en se rattachant à une certification existante (RS/RNCP), soit en déposant sa propre certification — long et technique. |
4. Être publié sur EDOF | Créer un compte validé par la Caisse des Dépôts, renseigner toutes les informations demandées, obtenir la validation finale pour apparaître sur MonCompteFormation. |
Trois étapes obligatoires, sans raccourci possible
Obtenir un Numéro de Déclaration d’Activité (NDA)
Le Numéro de Déclaration d’Activité (NDA) est la première étape officielle pour devenir organisme de formation. Il s’obtient en déclarant son activité auprès de la DREETS (ex-DIRECCTE), à condition d’avoir réalisé une première action de formation rémunérée. Sur le papier, cela semble simple. En réalité, cette étape est plus sélective qu’il n’y paraît.
Pour déposer un dossier, il faut fournir un ensemble de documents : programme de formation, convention ou contrat signé, premier émargement, justificatifs légaux, attestation URSSAF, etc. Le moindre oubli, la moindre erreur de forme ou d’écriture, peut entraîner un refus pur et simple.
Si aucun chiffre officiel n’existe aujourd’hui au niveau national, certaines données régionales permettent de se faire une idée très claire de la tendance actuelle. En Occitanie, par exemple, les chiffres transmis par la DREETS montrent une hausse spectaculaire du taux de refus ces dernières années :
Année | Déclarations déposées | Refus | % de refus |
---|---|---|---|
2019 | 1 751 | 270 | 15 % |
2020 | 1 820 | 295 | 16 % |
2021 | 2 609 | 535 | 20,5 % |
2022 | 3 108 | 837 | 27 % |
2023 | 3 460 | 1 209 | 35 % |
Ces données illustrent une réalité : l’administration devient de plus en plus stricte. À mesure que le nombre de demandes augmente, les DREETS filtrent davantage, et exigent des dossiers parfaitement conformes, sans marge d’interprétation.
Chez MonOF, sur la base de retours terrain et d’échanges avec des consultants spécialisés, nous estimons que le taux de refus au NDA au niveau national approche aujourd’hui les 50 %. Autrement dit, un dossier sur deux ne passe pas la première étape.
Cela signifie que dès le début du parcours, une majorité de formateurs échouent… sans même pouvoir entamer leur démarche Qualiopi ou CPF. Un constat qui montre à quel point l’accès à la formation professionnelle est désormais réservé à ceux qui savent cadrer leur projet avec rigueur — ou à ceux qui se font accompagner.
Obtenir la certification Qualiopi
Deuxième barrière : la certification Qualiopi, obligatoire depuis 2022 pour toute formation financée par des fonds publics. Il s’agit d’un audit externe réalisé par un organisme accrédité, qui vient vérifier la qualité du processus de formation selon 7 critères et 32 indicateurs.
Cet audit demande une préparation sérieuse : politique qualité, indicateurs, formalisation de l’offre, évaluations, gestion administrative… Pour un indépendant, cela implique des semaines de travail, souvent en plus de l’activité quotidienne. Et bien sûr, un coût non négligeable : en moyenne 1 000 à 1 500 € HT.
Rendre sa formation certifiante : l’obstacle décisif
C’est l’étape la plus mal comprise du parcours CPF : avoir la certification Qualiopi ne suffit pas. En 2025, pour qu’une formation soit finançable par le CPF, elle doit préparer à une certification professionnelle reconnue par l’État, inscrite au Répertoire Spécifique (RS) ou au Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP).
Autrement dit, votre formation doit permettre au stagiaire d’obtenir une certification officielle, validée par France Compétences. C’est une condition incontournable, et pourtant, c’est ici que la majorité des projets échouent.
Deux options s’offrent à vous :
- Se rattacher à une certification existante, détenue par un certificateur qui vous autorise à l’utiliser. Mais ces certificateurs sont très sélectifs, et peu acceptent de nouveaux partenaires.
- Créer votre propre certification, en la faisant enregistrer auprès de France Compétences. C’est long, complexe, et risqué : la majorité des dossiers sont refusés.
C’est cette exigence de certification officielle qui rend aujourd’hui l’accès au CPF aussi difficile, même pour les organismes déjà certifiés Qualiopi.
L’étape cachée : réussir son intégration sur EDOF
C’est une étape souvent oubliée… jusqu’au moment où elle bloque tout. Une fois le NDA, la certification Qualiopi et le rattachement à une certification en poche, il reste un dernier passage obligatoire : être publié sur EDOF, la plateforme de la Caisse des Dépôts et Consignations qui permet de rendre ses formations visibles et finançables sur MonCompteFormation.gouv.fr.
En soi, la procédure n’est pas techniquement compliquée. Il s’agit de déposer une demande de création de compte, en fournissant un certain nombre de documents justificatifs. Mais en pratique, les choses se corsent sur deux points :
- Les exigences documentaires ont augmenté :
La Caisse des Dépôts demande désormais de nombreux justificatifs complémentaires, parfois différents de ceux exigés pour Qualiopi : extrait Kbis récent, attestation d’assurance, preuve du rattachement à une certification, justificatifs d’identité du dirigeant… Le tout doit être envoyé dans un format précis, sans erreur. - Les délais sont longs — très longs en cas de refus :
Le vrai frein, c’est le temps de traitement. Obtenir un retour peut prendre plusieurs semaines, voire plus d’un mois. Et si votre demande est refusée, le délai s’allonge encore : vous devrez patienter deux mois complets avant de pouvoir déposer une nouvelle demande.
Accéder au CPF : un parcours balisé en apparence… mais verrouillé en pratique
Après avoir décortiqué les étapes du parcours d’accès au CPF, une conclusion s’impose : le système n’est pas impossible d’accès, mais il est devenu extrêmement sélectif. En 2025, seuls les organismes de formation capables de penser leur activité comme une véritable structure professionnelle parviennent à franchir toutes les étapes. Les autres, souvent des indépendants mal informés ou mal préparés, se heurtent à un mur administratif et réglementaire.
Ce que montrent les chiffres (et les silences)
Il n’existe pas de tableau de bord national unique permettant de suivre précisément les refus de publication sur EDOF ou les blocages administratifs liés au CPF. Les données sont fragmentaires, parfois techniques, et rarement commentées. Cela renforce l’impression d’un système opaque, sans que cela signifie nécessairement qu’il est injuste ou fermé par principe.
Mais lorsqu’on compile les chiffres disponibles, une tendance claire se dessine : accéder au CPF est devenu beaucoup plus exigeant qu’auparavant, tant pour les usagers que pour les organismes de formation.
Selon les dernières données de la Dares :
- Le nombre total d’entrées en formation financées par le CPF est passé de 1,84 million en 2022 à 1,33 million en 2023. Soit une baisse de –27,7 % en un an.
- Les formations à distance, très prisées ces dernières années, ont connu une chute de près de 46 % sur la même période.
- Certaines catégories de formations, comme la création d’entreprise, sont en recul très marqué : –69 % d’entrées en 2023 par rapport à 2022.
Cette baisse peut s’expliquer par plusieurs facteurs :
- Un renforcement des contrôles (notamment face aux dérives passées) ;
- Une sélection plus stricte des certifications acceptées ;
- Des choix politiques visant à recentrer les financements sur des priorités clairement identifiées (métiers en tension, reconversion, montée en compétences certifiantes…).
Ces chiffres ne disent pas que le CPF est devenu inaccessible. Mais ils montrent qu’il est désormais réservé aux organismes qui s’inscrivent dans un cadre bien défini, avec une offre structurée, certifiante et alignée sur les attentes de l’écosystème public.
Pour les autres – notamment les indépendants ou les petits OF qui avancent seuls – le moindre écart ou retard peut ralentir, voire bloquer, l’accès effectif au CPF. Ce n’est pas impossible, mais cela demande méthode, patience… ou accompagnement.
Ce qu’il faut pour réussir : méthode, rigueur… ou accompagnement
Malgré les obstacles, accéder au CPF en 2025 reste possible. Mais il faut en avoir conscience : ce n’est plus une démarche qu’on peut improviser. La complexité du parcours, la normalisation des procédures et la technicité des exigences imposent aujourd’hui une approche professionnelle, structurée, et très rigoureuse.
Les organismes de formation qui parviennent à tirer leur épingle du jeu en 2025 sont ceux qui :
- Anticipent chaque étape (NDA, Qualiopi, certification, EDOF) comme un processus à part entière ;
- Disposent de ressources dédiées, ou à défaut, s’appuient sur des experts extérieurs ;
- S’inscrivent dans des logiques de certification lisibles et reconnues, en phase avec les attendus de France Compétences et de la Caisse des Dépôts.
Concrètement, ce sont souvent les organismes structurés autour de l’accompagnement à l’emploi, les centres de formation déjà certifiés sur des titres forts du RNCP, ou les groupes disposant de ressources juridiques et qualité internes qui réussissent à intégrer le CPF durablement.
Mais pour les indépendants ou les petites structures, la clé réside aujourd’hui dans le choix d’un accompagnement adapté. Il est devenu très difficile, voire illusoire, de mener seul ce type de projet, tant les exigences sont nombreuses, mouvantes et interdépendantes.
C’est pourquoi des acteurs comme Digi-Certif sortent du lot. Leur accompagnement n’est pas seulement administratif : ils proposent des parcours clé en main, construits pour guider pas à pas les organismes, depuis la création du NDA jusqu’à la mise en ligne sur EDOF.
Leur force réside dans :
- Une parfaite connaissance des certificateurs qui acceptent les rattachements ;
- Une maîtrise des critères qualité liés à Qualiopi ;
- Et une vision réaliste et stratégique du CPF, débarrassée des fantasmes et des raccourcis trop beaux pour être vrais.
👉 En clair : le CPF est encore accessible, mais uniquement si l’on accepte de traiter le projet comme un vrai chantier — avec des outils, des compétences, du temps… et souvent un accompagnement.
Ce n’est ni facile ni rapide, mais ce n’est pas non plus inaccessible. Il faut juste être prêt à faire sérieusement ce que d’autres abandonnent trop vite.